La politique de l’inculture
La culture, ce mot cher à André Malraux qui lui fit dire qu’ « elle a fait de l’homme autre chose qu’un accident de l’univers ». L’un des premiers vecteurs de la culture est la langue, qui n’est pas un simple outil de communication mais demeure un pilier d’unité et de cohésion sociale. La langue française, richesse multiséculaire de notre civilisation, est « une femme si belle, si fière, touchante, noble… qu’on l’aime de toute son âme, et qu’on n’est jamais tenté de lui être infidèle ». Et pourtant…
Pourtant elle se délite, elle se mue, avec l’apparition de l’écriture inclusive, les dérives « anglofolles », le langage familier et abrégé, le monde du numérique, les émissions télé de lobotomisation des esprits, sans oublier l’absence de cadre dans l’instruction publique, de règles abandonnées sur l’autel de l’émancipation de l’enfant roi. Est-ce que le but de l’enseignement est de faire acquérir le savoir ou de socialiser pour rendre les enfants malléables. Les amoureux de notre belle langue deviennent des ringards devant notre jeune génération.
Pour Rabelais, « l’ignorance est la mère de tous les maux ». En effet, le savoir sert d’abord à former le jugement, à déterminer la réflexion personnelle. L’ignorance peut se révéler dévastatrice mais sa construction constitue un moyen puissant pour l’élite de dominer, ou formater, le peuple. Nos dirigeants, plutôt nos gestionnaires, ne savent pas ce qui est bon pour la nation et ce qui la compose.
Enfin, constater la dégradation du discours politique est devenu banal dans un bon nombre de démocraties. La politique, avec ses échanges à travers la parole publique, agit sous forme de spectacle parfois déconnecté de la réalité, d’ostracisme, de mensonge, de manipulation, de calcul, d’idéologie en l’absence de débats répondant à l’intérêt général et à la vie quotidienne. Comment ne pas y voir la désaffection, la méfiance et la défiance de nos concitoyens ? Nos politiciens préfèrent les effets d’annonce et la dénaturation de la parole, quitte à diviser pour mieux régner, que l’accroche par la verbe autour de notre langue riche et belle qui fera parler les émotions.
Avec de telles dérives, le développement de la politique de l’inculture explique le désamour de la démocratie, entraînant les pays vers des formes de dictature. Rappelons-nous de cette phrase de Lionel Jospin : « la culture est l’âme de la démocratie ».
Ludovic DEMATHIEU
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