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Après la bataille


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Chronique de Dominique Jamet...

Que retenir des élections européennes de ce dimanche 26 mai, en limitant notre analyse, pour l’essentiel, à leur dimension nationale ?

Quelques observations, pour commencer :

Les divers instituts de sondage, dont les prévisions ont été proches du résultat final , pour ce qui est des deux formations arrivées en tête, se sont en revanche assez largement trompés et nous ont induits en erreur tant sur ce que serait l’ampleur de la participation que sur la répartition des suffrages entre les autres listes.
Ils n’avaient pas prévu, entre autres, la mobilisation, au dernier moment, de quelques millions d’électeurs, portant le pourcentage de votants au mirifique niveau de 50% des inscrits, (ce qui, sauf erreur, signifie qu’il y a quand même eu 50% d’abstentions).

Le Rassemblement national a retrouvé le statut de premier parti politique de France qu’il avait acquis pour la première fois, sous l’appellation de Front national, il y a cinq ans. Il l’emporte sur la République en marche, avec un pourcentage un peu plus faible mais davantage de voix qu’en 2014. Il l’emporte d’une courte tête, mais il l’emporte, et c’est l’essentiel. On notera cependant que les deux « mastodontes » autour desquels s’était focalisée la compétition ne pèsent chacun que le quart des votants, 12,5% des inscrits et que les autres listes présentes dans ce scrutin totalisent quand même, certes en ordre dispersé, 55% des exprimés, ce qui doit amener à relativiser l’idée d’un duopole en dehors duquel plus rien n’existerait. N’oublions pas que si les différents partis qui se réclament de la gauche étaient parvenus à s’unir, ils pèseraient encore à eux tous plus de 30% des votants. De quoi assurer une qualification pour le second tour et peut-être une victoire à la présidentielle de 2022.

En l’état, les deux partis, dits « de gouvernement », qui ont alterné au pouvoir pendant près de quarante ans, n’ont recueilli ensemble que 15% des suffrages exprimés ! A l’effondrement historique du Parti « socialiste », vieux de deux ans déjà, a répondu en écho la spectaculaire dégringolade du parti dit des « Républicains » que certains, le temps d’une campagne, persistent, machinalement ou malicieusement, à qualifier de « gaulliste », alors qu’il est depuis belle lurette aux antipodes de ce que fut et de ce qui fit le gaullisme. Passons…

Jean-Luc Mélenchon, tête pensante sans être tête de liste, mais également tête à claques de la France insoumise, a réussi à diviser par trois son score de 2017. Il fallait le faire…

La percée de la liste conduite par M.Yannick Jadot, vieux militant des Verts, dont le nom et le renom étaient jusqu’il y a peu restés relativement confidentiels, est évidemment l’événement le moins annoncé, mais le plus lourd de sens et porteur d’inconnu du scrutin de dimanche dernier. En fait, le progrès récent de la sensibilité écologique ou assimilée en France est tel qu’elle atteint désormais à peu près le même niveau qu’outre-Rhin. Si l’on ajoute en effet aux 13,5% de la liste EELV les 1,8% de la liste Urgence Ecologie de M. Bourg et les 2,2% obtenus par le Parti animaliste, on arrive à un total de 17,5%, supérieur au score remarquable réalisé par Daniel Cohn-Bendit en 2014, et pas si loin de celui des Grünen en Allemagne.
Pour mémoire, on rappellera que sur les 34 listes qui avaient fait acte de candidature, six seulement enverront des représentants au Parlement européen. En vertu de la barre des 5%, ni la liste de Benoît Hamon, malgré ses 3,3%, ni celle de Ian Brossat, (2,5%) en dépit d’une campagne remarquable qui pour un peu aurait fait croire à la résurrection de feu le Parti communiste, ni celle de Jean-Christophe Lagarde (2,5%) ni Debout la France (3,5%) ni le Parti animaliste, ni Urgence écologie ni l’UPR (1,2%) n’auront aucun eu droit a aucun élu. Un peu plus de 18% des votants sont considérés comme quantité négligeable. C’est ce qu’en France on appelle la proportionnelle intégrale. Pour rire ?

Maintenant, quelles leçons tirer de ces résultats ?

Alors qu’il entame la deuxième année de son quinquennat, Emmanuel Macron a conservé, à deux points près, le niveau atteint, lors de sa marche triomphale vers le pouvoir, en avril 2017 : 22,4% contre 24,01 %. Il n’a ni étendu ni restreint le socle minoritaire sur lequel il a élevé sa propre statue. Ce qu’il a pu perdre, sur sa gauche, d’électeurs qui faisaient confiance à l’ancien ministre de François Hollande, il l’a à peu près compensé en gagnant sur sa droite des électeurs séduits par les réformes « libérales » déjà menées à bien ou programmées pour les mois à venir, qui sont celles que Chirac ou Sarkozy avaient promises et qu’ils n’avaient pas cherché ou réussi à réaliser. Mais à quel prix le président le plus impopulaire, voire le plus haï, de la Ve République a-t-il réussi son coup ?

La République en marche n’apparaît plus en 2019 comme le vecteur d’une révolution économique, morale, technique et sociale, dont les bienfaits ruisselleraient sur la société française et profiteraient aux plus humbles, aux plus précaires, aux plus défavorisés. Sous un nom de baptême qui doit plus au marketing qu’à l’idéologie, le parti présidentiel n’est rien d’autre que l’avatar actualisé de l’éternel Parti de l’Ordre, ordre public, ordre social, Si nous étions restés à l’époque où l’on désignait les gens et les choses par leur nom, où les « territoires », les « régions » étaient tout bêtement la province, on nous parlerait à juste titre d’un parti bourgeois. La République en marche est le parti de la bourgeoisie, grande, moyenne et petite, des possédants, des nantis, des rentiers, des modérés, des centristes de gauche et surtout de droite, des raisonnables, des gagnants. Le jeune M. Macron est sous ses affûtiaux contemporains l’homme des classes moyennes supérieures, la réincarnation « moderne » de l’honorable M. Guizot et son très provocateur « Je veux que les jeunes Français aient envie de devenir milliardaires » fait écho au célèbre et sentencieux « Enrichissez-vous » du Premier ministre de Louis (je dis bien Louis et pas Edouard) Philippe.

C’est sur cette base qu’Emmanuel Macron, dont on ne saurait nier la pugnacité et les audaces tactiques, a délibérément cherché à faire d’une élection intermédiaire qu’il savait difficile, voire compromise, un plébiscite pour ou contre la poursuite de la construction « européenne », pour les « progressistes » contre les « nationalistes », pour ou contre le parti et la dirigeante dont il avait triomphé le 10 mai 2017, pour le camp du Bien contre le Rassemblement national., pour ou contre lui-même. Ce faisant, le chef de l’Etat, abandonnant son statut de président de tous les Français pour celui de chef de parti, troquant son costume d’arbitre pour la tenue de gladiateur, descendant dans l’arène en somme, assumait un risque et prenait un pari. Ce pari, il l’a perdu. De peu, mais ce peu est beaucoup sur le plan des symboles, et lourd de conséquences que l’on voit déjà se dessiner.

Ceux qui, dimanche dernier, ont fait le choix de Mme Loiseau, (1) comme ceux qui ont voté pour Jordan Bardella sont tombés dans le piège que leur avait tendu et où s’est pris Emmanuel Macron. En désignant Marine Le Pen et son parti comme l’adversaire unique, comme le seul autre terme possible d’une alternance, le chef de l’Etat a recréé le débat et le duel du second tour de l’élection présidentielle. En relégitimant celle qu’il avait alors écrasée, il a réinstallé le Rassemblement national dans le rôle de la seule opposition crédible. Il est clair qu’en reconstituant les conditions qui lui avaient donné la victoire, il escomptait bien bénéficier, le jour venu, des mêmes réflexes et des mêmes désistements qui lui avaient valu en 2017, d’un tour à l’autre, d’engranger et d’ajouter à ses 24% de votes d’adhésion 42% de votes par défaut.

Le calcul est cousu de gros fil blanc, mais les données sont-elles et seront toujours les mêmes ? Le fameux plafond de verre contre lequel la famille Le Pen s’est régulièrement fracassée tiendra-t-il encore dans trois ans ? L’hypothèse d’un Front national définitivement exclu du pouvoir ne cesse de se fragiliser au fur et à mesure que s’élargit et se creuse le fossé entre les dirigeants et la population de la France, comme ce fut le cas lorsqu’il y a deux siècles et demi vacillait l’Ancien régime. Ce n’est plus que dans les salons parisiens, entre la rue Oberkampf et le boulevard Saint-Germain, sur les plateaux de la télévision et dans les délires complotistes des éditorialistes médiatiques, que le Rassemblement national est décrit et dénoncé comme un parti fascistoïde, factieux, stipendié par l’étranger et dont le gilet jaune serait taché de brun… Si les Gilets jaunes, comme il semble, faute d’avoir trouvé une traduction politique cohérente et organisée de leur mouvement, ont massivement voté pour le Rassemblement national, c’est qu’ils voient dans ce parti l’exutoire le plus crédible, et actuellement le seul, de leurs colères, de leurs rejets, de leurs angoisses et de leurs frustrations. Si le Rassemblement national est aujourd’hui plébiscité par 40% des ouvriers et des employés, c’est qu’il est est identifié par eux comme le seul qui soit en résonance avec ces malheureuses « classes moyennes inférieures » en voie de déclassement accéléré, le seul qui prenne en compte les perdants, les vaincus, les exclus, que notre société, avec ses beaux discours, abandonne froidement sur le bord du chemin. Les électeurs qui ont voté pour Jordan Bardella ne rêvent pas d’un nouvel Hitler ou d’un nouveau Mussolini, ils se contenteraient déjà d’un autre Matteo Salvini. Voilà où nous en sommes.

Venu d’un autre bord, fort d’une éloquence tribunitienne dont l’intelligence, la profondeur, la qualité, la cohérence, dans ses meilleurs moments, dépassaient de loin les talents d’un Jean-Marie Le Pen, Jean-Luc Mélenchon a bénéficié en avril 2017 d’un état de grâce qui l’avait porté à un niveau jamais atteint par sa mouvance, aux portes d’un second tour qu’il n’a finalement pas atteint. En piètre gestionnaire, il a dilapidé ce précieux capital par ses outrances personnelles et politiques, par le soutien délirant qu’il a cru devoir réaffirmer à des dictatures archaïques, et en définitive par son incapacité à choisir entre la part radieuse, lumineuse, progressiste, laïque, patriotique de notre Révolution et la farce sanglante de sa caricature par les totalitarismes du XXe siècle. Confronté aux conséquences de ses erreurs et de sa gestion erratique de la France insoumise, aura-t- il assez de lucidité et de modestie pour se ressaisir ? Il apparaît aujourd’hui presque aussi discrédité et menacé de perdre son leadership qu’un Laurent Wauquiez.

François-Xavier Bellamy a cru devoir demander à ses « amis » Républicains de lui pardonner son échec. Ce charmant garçon dont des foules conquises ont pu apprécier les yeux bleus, les fossettes, le sourire et les dons de conférencier, était le champion d’une cause désespérée. Comment aurait-il pu porter plus haut qu’il ne l’a fait un parti qui n’a plus aucune raison d’être, puisque le gouvernement d’Edouard Philippe, de Bruno Le Maire, de Gérald Darmanin, avec la bénédiction d’Alain Juppé ou de Jean-Pierre Raffarin et sous l’égide d’Emmanuel Macron, applique peu ou prou le programme de François Fillon, et que la République en marche a vocation à siphonner sa composante la plus centriste, tout comme le R.N. à absorber sa frange la plus droitière. Le Parti socialiste, de son côté, a poussé un soupir de soulagement après que, contre toute attente, Raphaël Glucksmann a réussi à égaler le score de Benoît Hamon en 2017 et à envoyer six députés à Bruxelles. C’est dire où en est la formation de Jean Jaurès, de Léon Blum et de François Mitterrand, qui, sous la direction nominale d’Olivier Faure ne sait plus qui elle est, à quoi elle sert et où elle va…

La grande nouveauté de ces élections européennes aura été, je le disais plus haut, le succès de la liste EELV emmenée par Yannick Jadot et tout d’un coup rejointe, si ce n’est submergée, par l’afflux soudain et inespéré d’un électorat nouveau, ardent et dynamique. Les thèmes du réchauffement climatique, de la lutte contre la pollution, de l’urgence écologique, authentifiés par nombre de scientifiques, répandus comme une traînée de poudre et amplifiés par les réseaux sociaux, ont fourni à une jeunesse dépolitisée, désabusée, défiante, la grande, la belle, la noble cause qui avait manqué aux générations précédentes. « Sauvons notre planète ! », tel est le mot d’ordre où elle se retrouve, où elle se rassemble et qui, à partir de constats alarmants et de préoccupations justifiées, mêle dans une certaine ambiguïté de généreuses motivations et le plus classique des égoïsmes. Sur des inquiétudes légitimes surfent avec délectation des politiciens démagogues dont les nobles postures et les préconisations de bon sens masquent tant bien que mal un manque dramatique de lucidité et de courage. Sauvera-t-on la planète en fermant les centrales nucléaires, les centrales à charbon, en multipliant les économies de bouts de chandelles et en triant les Kleenex, en dénonçant les excès de la surproduction et de la surconsommation dans le seul monde occidental, dans les seuls pays développés ? A quoi sert de déplorer les effets et de ne pas rechercher les causes, de stigmatiser le mal et de ne pas en indiquer les remèdes ?

Sept milliards d’êtres humains peuplent aujourd’hui notre planète. Ils seront douze milliards d’ici la fin du siècle. Peut-on croire un seul instant que ces cinq milliards de nouveaux venus n’auront pas d’empreinte carbone, qu’ils ne respireront pas, qu’ils ne mangeront pas, qu’ils ne produiront pas, qu’ils ne feront pas tout pour se rapprocher le plus possible des standards de vie qui sont les nôtres, et des pays qui en jouissent ? Faire miroiter aux yeux des jeunes alouettes qui voient l’avenir avec les yeux embués de larmes de la petite Greta Thurnberg la perspective d’un monde redevenu un paradis terrestre sans leur dire que ce monde n’adviendra pas si l’on ne désamorce pas d’abord la bombe démographique qui menace d’exploser à la figure de nos descendants, si l’on n’endigue pas la marée humaine qui videra les pays pauvres et déferlera sur les mégapoles prospères et inhumaines des pays développés, si l’on remet sine die les deux problèmes majeurs que sont la surpopulation et les migrations, on se rendre complice d’une imposture criminelle dont les conséquences pèseront sur les générations à venir. Aux enfants à qui l’on ne montre que le Vert à moitié plein, il faut montrer le Vert à moitié vide.

*
* *
Les souverainistes, en tant que tels, et les questions essentielles qu’ils posent, auront été, du moins en France, les grands absents d’élections européennes dominées comme c’est le cas depuis 1979, par des débats et surtout des enjeux de politique intérieure. Des querelles d’ego, des questions de préséance, d’antériorité, des désaccords mineurs mis en avant, la présomption de celui-ci, l’arrogance de celui-là auront finalement empêché la constitution, en dehors du « mastodonte » de plus en plus incontournable qu’est le Rassemblement national, d’une liste unique rassemblant tous ceux qui, attachés à la démocratie et à la justice sociale, venus de gauche, de droite ou de nulle part, militent pour restaurer ou sauvegarder notre indépendance, notre identité, notre culture, notre civilisation, et même, pour dire les choses plus brutalement, qui sont prêts à s’engager pour défendre la culture et la civilisation.

Notre cause est-elle bonne ? Oui. Est-elle perdue ? Non. Pas seulement parce qu’elle est bonne, mais surtout parce qu’elle est clairement ou confusément partagée par des centaines de milliers, par des millions de Français et de Françaises qui s’inquiètent, s’affligent ou s’indignent du péril et de la déchéance où s’abîme leur pays, notre pays, mais qui constatent que le salut de la France et de la République ne s’incarne présentement de manière satisfaisante dans aucun homme ni dans aucun parti.

Est-ce une raison pour renoncer ? L’histoire, disait le général de Gaulle, c’est la rencontre d’un événement et d’une volonté, des circonstances et d’un homme. Les circonstances sont là, et, comme Diogène, dans la nuit, nous cherchons l’homme.

(1) A l’attention des passionnés d’histoire contemporaine : Mme Loiseau (Nathalie) est le nom de la personne qui avait été choisie par Emmanuel Macron pour le représenter à la tête de la liste LREM aux élections européennes de 2019.


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