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E.N.A. : MAIS OU SONT PASSES LES HUSSARDS GRIS ?


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Chronique de Dominique Jamet, à retrouver en dernière page du magasine "Marianne"

C’est une simple ordonnance, mais signée Charles de Gaulle, qui, le 9 octobre 1945, portait création de l’École nationale d’administration. Pourquoi le chef du gouvernement de la République française d’après Libération avait-il confié au fidélissime Michel Debré la mission de réformer, de moderniser, et de démocratiser (déjà) les processus de formation et de recrutement de notre haute fonction publique ?

Imbu de la plus pure tradition centralisatrice, successivement incarnée par nos rois, nos empereurs ou les pères fondateurs de nos Républiques, le général de Gaulle entendait créer un corps de hauts fonctionnaires, comparable aux mythiques légistes de l’Ancien régime, qui serait au service de l’État et du public ce qu’avaient été à notre système scolaire les hussards noirs de la République, des hussards gris, en somme. La compétence, l’intégrité, le dévouement seraient la marque distinctive de cette nouvelle noblesse qui ne serait fondée ni sur l’hérédité ni sur le « piston » mais sur le seul critère du mérite –en est-il de meilleur ? – et le concours, anonyme (du moins à l’écrit), secret, égalitaire, serait le vecteur naturel de la sélection et de l’admission au sein de cette élite (le mot ne faisait pas encore peur).

Telle quelle, l’ENA, dès sa prime jeunesse, ne tarda pas à briller au firmament de la méritocratie républicaine d’un éclat qui fit pâlir les traditionnelles grandes écoles, Normale Sup, Polytechnique, Centrale, Mines. Le temps des énarques était venu.

Grandeur et décadence, irrésistible ascension et chute ignominieuse. Comment en un plomb vil l’or pur s’est-il changé ? En l’espace d’un demi-siècle l’ENA est devenue aux yeux de notre société le symbole d’une oligarchie incomparablement plus détestée que la police, l’image d’une caste arrogante, déconnectée de la réalité, d’une véritable aristocratie ou plutôt d’une franc-maçonnerie, et cela dans le cadre d’une contestation générale des hiérarchies et des élites.

On n’en finirait pas d’énumérer les divers reproches adressés à la haute institution. Si le mérite reste un critère communément reconnu, est-ce toujours le mérite ou l’acceptation d’un formatage du langage, du caractère, de l’idéologie, l’adhésion aux dogmes du libéralisme, de l’européisme, de l’atlantisme, du mondialisme, est-ce le savoir-faire ou le faire-valoir, est-ce la forme ou le fond, la sagesse ou le sophisme, la profondeur ou l’esbroufe qui sont le sésame d’entrée puis de la réussite dans la carrière ? Dans un monde où la bourdieuserie étend chaque jour ses ravages, un monde où l’école est censée perpétuer, reproduire, voire aggraver les inégalités sociales, alors qu’elle est évidemment la seule filière qui permette de les compenser, de les atténuer, de les effacer, l’ENA, suivant certains, ce que d’autres contestent, serait le repaire des fils d’ambassadeurs et des neveux d’archevêques. La bataille des statistiques fait rage et chacun retient celle qui l’arrange.

Plus profondément, ce que l’on reproche à l’ENA, outre son monopole de fait sur les grands corps de l’État, c’est de ne plus se cantonner à sa vocation initiale qui était d’assister les politiques, mais d’être le vivier où recrute la politique, le hub qui organise les correspondances et les allers-retours entre public et privé, c’est de ne plus être le sanctuaire où l’on prononce ses vœux d’entrée dans un sacerdoce ad vitam mais un club de privilégiés et de nuisibles.

Énarque lui-même, comme trois de ses prédécesseurs entouré d’énarques qui forment le noyau dur de son gouvernement, Emmanuel Macron jette en pâture à l’opinion la haute école qui l’a déformé. Qu’en sera-t-il de l’ISF (quel acronyme !) qu’on nous annonce ? Une sous-ENA, ou un clone de l’ENA, avec les mêmes vices de construction ? L’homme de l’en même temps qui n’est souvent rien d’autre qu’une variante du lampédusisme (« il faut que tout change pour que rien ne change ») excelle dans la pratique du one man show. On ne doute guère qu’il trouve les mots pour expliquer cette nouvelle « réforme » et faire valoir qu’elle était inscrite depuis toujours dans le « destin profond » ou dans les gènes de la France. Nous avons un président beau parleur. De Gaulle était un grand homme d’État. Pompidou un grand patron. Giscard un grand commis (je ne dis pas un grand comique). Mitterrand un grand politicien. Chirac un grand menteur. Sarkozy un grand petit homme (little big man). Hollande un grand diseux (et un petit faiseux). Macron est incontestablement un grand oral. De l’ENA.

Dominique Jamet


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